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  • REVIEW - JOURNAL OF FUNCTIONAL VENTILATION AND PULMONOLOGY. VOLUME 5 - ISSUE 14. 2014

    Last Updated: 29/08/2018

    Equation des gaz alvéolaires et différence alvéoloartérielle en oxygen
    Alveolar gas equation and alveolo-arterial difference in oxygen
    B. Le Huu Thien, D. Huynh Quang

    Département de Réanimation - Médecine d’Urgence - Toxicologie
    Université de Médecine et Pharmacie d’Ho Chi Minh Ville - Vietnam

    Corresponding author
    Dr. LE HUU THIEN Bien
    Département de Réanimation - Médecine d’Urgence - Toxicologie
    Université de Médecine et Pharmacie d’Ho Chi Minh Ville
    E-mail: bien.le@umc.edu.vn

    DOI: 10.12699/jfvp.5.14.2014.5

     

     

    ABSTRACT

    The alveolar gas equation predicts alveolar oxygen pressure according to partial pressure of oxygen in inspired gas and partial pressure of arterial carbon dioxide.

    Based on alveolar oxygen pressure, the alveolar-arterial oxygen gradient, an index used to differentiate respiratory failure etiology and evaluate lung injury severity, is calculated. Although alveolar-arterial oxygen gradient is affected by some physiologic and pathologic factor, it is the first and simplest step in assess lung gas exchange.

    The evaluation of gas exchange effectiveness plays an important role in assessing severity of lung diseases. The main parameters estimating blood oxygenation are the difference or the ratio between arterial pressure of oxygen (PaO2) and the partial pressure of oxygen in alveoli (PAO2).

    In clinical practice, PaO2 is easily measured by analysis of arterial blood gas (ABG), while we can only estimate PAO2 by direct measurement of partial pressure of oxygen in expired air or by calculation of PAO2 from alveolar gas equation.

    KEYWORDS: Gas exchange, PaO2, PAO2, arterial blood gas

    RÉSUMÉ

    L’équation des gaz alvéolaires prédit la pression alvéolaire d’oxygène selon la pression partielle en oxygène dans l’air inspiré et la pression partielle en dioxyde de carbone dans le sang artériel.

    C’est la base pour le calcul du gradient d'oxygène alvéolaire-artériel, un indice utilisé pour différencier les étiologies de l’insuffisance respiratoire et pour évaluer la gravité des blessures pulmonaires. Bien qu’il soit affecté par un certain nombre de facteurs physiologiques et pathologiques, le gradient d’oxygène alvéolaire-artériel est le premier et le plus simple étape pour estimer l’échange gazeux du poumon.

    L’évaluation de l’efficacité des échanges gazeux joue un rôle important dans l’évaluation de la sévérité des lésions pulmonaires. Les principaux paramètres estimant l’oxygénation sanguine sont la différence ou le ratio entre la pression artérielle en oxygène (PaO2) et la pression partielle de l’oxygène dans les alvéoles (PAO2).

    En pratique clinique, la PaO2 est facilement mesurée par l’analyse de gaz du sang artériel (GDS), alors qu’on ne peut estimer la PAO2 que par la mesure directe de la pression partielle en oxygène dans l’air expiré ou par le calcul de la PAO2 à partir de l’équation des gaz alvéolaires.

    MOTS CLES: Echanges gazeux, PaO2, PAO2, gaz du sang artériel

     

    INTRODUCTION

    L’évaluation de l’efficacité des échanges gazeux joue un rôle important dans l’évaluation de la sévérité des lésions pulmonaires. Les principaux paramètres estimant l’oxygénation sanguine sont la différence ou le ratio entre la pression artérielle en oxygène (PaO2) et la pression partielle de l’oxygène dans les alvéoles (PAO2). En pratique clinique, la PaO2 est facilement mesurée par l’analyse de gaz du sang artériel (GDS), alors qu’on ne peut estimer la PAO2 que par la mesure directe de la pression partielle en oxygène dans l’air expiré ou par le calcul de la PAO2 à partir de l’équation des gaz alvéolaires. Cet article a pour but de résumer les bases physiologiques de l’estimation de la PAO2 et son application dans l’évaluation de la différence alvéolo-artérielle en oxygène.

    EQUATION SIMPLIFIEE DES GAZ ALVEOLAIRES

    L’équation des gaz alvéolaires peut s’écrire sous forme simplifiée comme la suivante:

    PAO2 = PIO2 – PaCO2/R

    Cette équation est établie sur deux bases: un état d’équilibre des gaz alvéolaires et la loi de Dalton concernant la pression partielle d’un gaz parfait en milieu gazeux [1].

    Dioxyde de carbone
    Au repos, le corps humain produit environ 200 ml de CO2 par minute (VCO2). En état d’équilibre, ce volume de CO2 est entièrement éliminé, ce qui maintient la PaCO2 stable. Donc, on peut écrire:

    VCO2 = FACO2 * VA (1)

    où FA est la fraction de CO2 dans l’air alvéolaire (PACO2/PI) et VA la ventilation alvéolaire.

    Oxygène
    En état d’équilibre, la PAO2 reste stable, le volume d’oxygène qui entre dans les alvéoles est égal à celui qui en sort.
    Le volume d’oxygène qui entre dans les alvéoles est déterminé par FIO2 * VA (2). Le volume d’oxygène qui sort des alvéoles se compose de deux parties: le volume d’oxygène consommé = VO2 (3); le volume d’oxygène expiré = FAO2 * VA (4). Donc, il peut être établi que:

    (2) = (3) + (4) FIO2 * VA = VO2 + FAO2 * VA

    D’où:
    VO2 = VA * (FIO2 – FAO2) (5)

    Quotient respiratoire
    Le quotient respiratoire (R) est le rapport entre la production de CO2 et la consommation d’O2

    R = VCO2/VO2 (6)

    Remplacer les équations (2) et (5) dans la (6)

    Où FAO2 = FIO2 – FACO2/R.

    Selon la loi de Dalton, chaque gaz contribue à la pression totale proportionnellement à sa concentration (par exemple, si la pression des gaz alvéolaires est de 100 mmHg et la fraction d’oxygène est de 80%, la pression partielle en oxygène dans les alvéoles est donc de 80 mmHg). Vue la grande capacité de diffusion de CO2 à travers la membrane alvéolo-capillaire, la PACO2 (ou FACO2) est considérée comme égale à la PaCO2. On peut donc remplacer la FAO2 par la PAO2, FIO2 par PIO2 et FACO2 par PACO2 pour obtenir l’équation simplifiée des gaz alvéolaires:

    PAO2 = PIO2 – PaCO2/R

    Points importants de l’équation des gaz alvéolaires
    Des conditions correctes de l’équation des gaz alvéolaires
    L’équation des gaz alvéolaires ne peut être vraie que lorsque le corps humain maintient son état d’équilibre, ce qui signifie que la PaO2 et la PaCO2 restent stables pendant un certain temps. En plus, la PIO2 et la FACO2 doivent correspondre aux « conditions vitales ».

    Par exemple, pour un niveau trop bas de la PIO2 ou un niveau trop élevé de la FACO2, la valeur de la PAO2 peut être négative. Néanmoins, dans ces cas-là, l’état d’équilibre ne peut pas être établi et donc cette condition devient physiologiquement impossible.

    Modifications de l’équation des gaz alvéolaires selon ses variables
    Selon l’équation des gaz alvéolaires, la PAO2 (ou FAO2) dépend de trois paramètres : PIO2, PaCO2 et R. Sachant que le quotient respiratoire R est déterminé par la composition des types d’aliments métabolisés et que son changement est négligeable, la PAO2 se varie essentiellement selon les deux autres paramètres, la PIO2 et la PaCO2.

    Si le rapport PaCO2/PACO2 est stable, l’équation des gaz alvéolaires peut être s’écrire comme: y = mx + c, avec m =1, x = PIO2 et c = [-PACO2/R]. La courbe illustrant le rapport entre PAO2 et PIO2 a une forme linéaire (Figure 1). On peut noter que le point où la courbe coupe l’axe vertical (ordonné) a une valeur négative de PAO2, ce qui est donc contre l’état physiologique (normal). Cette équation n’a un sens physiologique qu’avec une PIO2 minimale d’environ 10 kPa.

    A chaque valeur de PIO2 fixée, la PAO2 obtient une relation linéaire avec la PACO2. Cependant la relation entre PAO2 et VA est non-linéaire (Figure 2).

    À partir de l’équation (1), on peut écrire:

    PACO2 = VCO2*PI/VA (=PaCO2)

    Remplacer celle-ci dans l’équation des gaz alvéo- laires:

    PAO2 = PIO2 – VCO2*PI/VA*R = PIO2 – 1/VA * [VCO2*PI/R]

    Cette formule devient: y = mx1/x + c.

    Etant donné la relation linéaire entre la PIO2 et la PAO2 (Figure 1), il est probable que l’augmentation de la PAO2 est plus importante par augmentation de la PIO2 que par celle de la ventilation alvéolaire (Figure 2). En revanche, en ventilation spontanée (en air ambiant ou avec de l’oxygène à débit constant), l’augmentation de la ventilation est certes le seul moyen d’amplifier la PAO2.

    EQUATION COMPLETE DES GAZ ALVEOLAIRES

    L’équation complète des gaz alvéolaires présentée dans le livre « West’s Respiratory Physiology » [3] est la suivante:

    PAO2 = PIO2 – PaCO2/R + [FIO2*PaCO2*(1-R/R)]

    Dans l’équation simplifiée, on ne tient pas compte du changement de volume induit par les échanges gazeux, ce qui n’est pas vrai en réalité. Présumant que le volume de CO2 produit par minute est de 200 ml, avec un quotient respiratoire de 0,8, le volume d’oxygène consommé par minute sera de 250 ml. Pour maintenir un volume résiduel fonctionnel stable, il faut ajouter environ 50 ml d’air dans le volume d’air inspiré.

    En général, le volume d’air ajouté dans l’air inspiré est identique à la différence entre le volume d’oxygène consommé et celui de CO2 produit: Vp = [VO2 – VCO2] qui suit la loi générale des gaz: PV = nRT. L’équation (2) peut s’écrire comme: le volume d’oxygène qui entre dans les alvéoles = FIO2*VA + FIO2*Vp (7).

    Selon ce raisonnement, on a (7) = (4).

    FIO2*VA + FIO2*Vp = VO2 + FAO2*VA
    VO2 = VA (FIO2 – FAO2) + FIO2*Vp

    On peut l’appliquer dans la formule du quotient respiratoire:

    R = VCO2/VO2 = (FACO2*VA)/[VA(FIO2 – FAO2) + FIO2*Vp].
    VA(FIO2 – FAO2) + FIO2*Vp = FACO2*VA/R
    (FIO2 – FAO2) + FIO2*Vp/VA = FACO2/R
    FAO2 = FIO2 – FACO2/R + [FIO2*Vp/VA] (8)

    Etant donné que Vp = VO2 – VCO2 et VO2 = VCO2/ R, l’équation donc devient: FIO2*Vp/VA = FIO2*VCO2 [1/R – R]/VA = FIO2*VCO2 [(1-R)/R]/VA Remplacer VCO2/VA par FACO2: FIO2*FACO2*(1-R/R) (9) Remplacer (9) dans (8): FAO2 = FIO2 – FACO2/R + [FIO2*FACO2*(1-R/R)]

    On peut aussi écrire cette équation sous la forme de pression partielle: PAO2 = PIO2 – PaCO2/R + [FIO2*PaCO2*(1-R/R)].

    DIFFERENCE ALVEOLO-ARTERIELLE EN OXYGENE

    Definition et formule
    Définition
    Les échanges gazeux entre l’air des alvéoles et le sang n’obtient jamais de rendement de 100%, c’est pourquoi la pression partielle artérielle en oxygène (PaO2) est toujours inférieure à celle alvéolaire (PAO2).

    La différence alvéolo-artérielle en oxygène, marquée comme P(A-a)O2 ou AaDO2, est la différence entre la PAO2 calculée de l’équation des gaz alvéolaires et la PaO2 mesurée. C’est le tout premier paramètre posé pour évaluer l’efficacité des échanges gazeux.

    Formule de la différence alvéolo-artérielle en oxygène

    AaDO2= PAO2- PaO2

    Où: PAO-2 représente la pression partielle en oxygène dans les alvéoles (calculée à partir de l’équation des gaz alvéolaires) ; PaO2 représente la pression partielle artérielle en oxygène (retirée du résultat du gaz du sang).

    PAO2 et l’équation des gaz alvéolaires

    PAO2 = PIO2 – PaCO2/R
                                                  = (PB - PH2O)*FIO2 - (PaCO2/R)

    Dans laquelle:
                    + PB représente la pression atmosphérique, au niveau de la mer, 760 mmHg.
                    +  PH2O représente la pression de la vapeur saturante de l’eau, 47 mmHg.
                    + FIO2 représente la fraction inspirée en oxygène, en air ambiant, 21%.
                    + PaCO2 est mesurée par l’appareil des gaz du sang, normalement d’environ 40 mmHg.
                    + R est le quotient respiratoire, ou la fraction des échanges gazeux, normalement 0,8.

    Dans les cas normaux, au niveau de la mer, cette équation donne :
                             PAO2 = (760 – 47) * 0,21 – (40/0,8)
                             = 100 mmHg

    PaO2
    La valeur de PaO2 est retirée du résultat des gaz du sang, normalement d’environ 95mmHg. Il faut retenir qu’il existe une diminution physiologique de la ± 5 mmHgPaO2 selon l’âge [4].

    PaO2 = 109 - 0,43 * âge (an(s).

    La diminution de la PaO2 avec l’âge est principalement due à une majoration des inégalités de ventilation/perfusion pulmonaire. A partir de 70 ans, la PaO2 chute d’environ 0,43 mmHg par an [5].

    Valeurs de référence
    La différence alvéolo-artérielle en oxygène (AaDO2) chez un sujet jeune et sain est inférieure à 10 mmHg (variant de 5 à 20 mmHg). Cette valeur dépend de multiples facteurs, principalement l’âge et la PAO2 [6].

    Age
    L’AaDO2 augmente avec l’âge, mais doit être inférieure à celle de référence calculée par (âge/4 + 2,5) [7].
    Ainsi, un patient de 36 ans a une valeur de l’AaDO2 normale < 36/4 + 2.5 = 10.5 mmHg. On peut également l’estimer par la loi du pouce : AaDO2 < âge/3.

    Néanmoins chez les patients très âgés, l’AaDO2 ne semble plus augmenter avec l’âge. A partir de 70 ans, l’AaDO2 normale est d’environ 40 mmHg chez l’homme et 41 mmHg chez la femme [8].

    Pression partielle en oxygène dans l’air inspiré
    Chez un patient sous oxygène (PIO2 > 21%), il y a donc une augmentation de la pression partielle en oxygène dans les alvéoles (PAO2), à l’origine d’une augmentation de l’AaDO2. Le degré d’accroissement de la l’AaDO2 est sous l’influence de plusieurs facteurs, principalement des inégalités de ventilation -perfusion, du shunt et de la concentration d’hémoglobine (cf. Les facteurs qui influencent l’AaDO2).

    Chez les sujets jeunes dépourvus de pathologie respiratoire et au niveau de la mer, l’AaDO2 s’élève d’environ 5–7 mmHg pour chaque augmentation de 10% en FIO2. Cette augmentation ne peut dépasser 70 mmHg, même sous l’oxygène à 100% [9].

    Comment estimer la valeur normale de l’AaDO2 ?
    La formule pour estimer l’AaDO2 sous l’influence de l’âge et de la PAO2 est:
    AaDO2 = Âge/3 + PAO2/5 - 23
    Exemple: un patient de 60 ans, sous FIO2 de 50%, PaCO2 à 40 mmHg.

    À partir de l’équation générale des gaz alvéolaires, la PAO-2 = (713 * 0,5) – 40/0,8 = 307 mmHg. L’AaDO2 espérée du patient est: 60/3 + 307/5 – 23 = 58 mmHg. La PaO2 estimée du patient est donc: 307 – 58 = 249 mmHg.

    Si la valeur de PaO2 mesurée est inférieure à celle ainsi estimée, il existe probablement une pathologie pulmonaire entravant les échanges gazeux.

    Facteurs diminuant l’AaDO2
    Les pathologies pulmonaires diminuant la capacité de diffusion alvéolo-capillaire (ou les échanges gazeux) peuvent augmenter l’AaDO2. D'ailleurs, il existe en même temps plusieurs facteurs extrapulmonaires qui influencent l’AaDO2 [10].

    Shunt pulmonaire
    Le shunt pulmonaire est le facteur le plus marquant influençant l’AaDO2. Chez des patients atteints d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), Covelli a calculé le ratio entre l’AaDO2 et le rapport Qs/Qt qui est d’environ 0,68 [11].

    Quand un patient respire de l’oxygène pur (FIO2 à 100%), seul l’existence d’un shunt pulmonaire peut expliquer une diminution de la PaO2. D’autres facteurs tel que les inégalités de ventilation-perfusion, la diminution de la capacité de diffusion alvéolocapillaire sont généralement bien compensées par l’augmentation excessive du gradient de pression alvéolo-capillaire en oxygène. On peut ainsi estimer le pourcentage du shunt intrapulmonaire par AaDO2/5 [12].

    Fraction inspiré en oxygène (FIO2)
    A un même niveau de shunt, plus la FIO2 est élevée, plus l’augmentation de l’AaDO2 est importante (Figure 3). L’AaDO2 donc ne reflète pas exactement de degré de sévérité des lésions pulmonaires quand le patient est sous oxygène à haute concentration (par exemple: FIO2 > 0,5).

    Concentration d’hémoglobine
    L’anémie est fréquente chez des patients en état critique. Une basse concentration d’hémoglobine peut entraîner une fausse augmentation de l’AaDO2 même que le niveau de shunt n’est point abondant (Figure 4). Ce phénomène peut être corrigé par évaluer l’AaDO2 avec FIO2 de 1,0.

    Différence artério-veineuse en oxygène
    La différence artério-veineuse en oxygène (Ca-vO2) est normalement de 5 ml/min. Cependant un débit cardiaque gravement diminué, tel que dans l’état de choc ou d’insuffisance cardiaque, peut élargir la CavO2. Cette situation peut aussi entraîner une fausse augmentation de l’AaDO2 (Figure 5).

    Intérêt clinique
    A partir des bases physiologiques susmentionnées, il est raisonnable que l’AaDO2 puisse être utilisée pour déterminer la (les) cause(s) d’une hypoxémie et pour évaluer la sévérité d’une détresse respiratoire aiguë.

    Diagnostic différentiel des étiologies de détresse respiratoire
    En théorie, dans les cas de détresse respiratoire type d’hypoventilation, l’augmentation de la PaCO-2 (ou de la PACO2) diminue la PAO2. Ce qui explique pourquoi l’AaDO2 reste normale tant que la PaO2 est basse. Autrement dit, l’AaDO2 aide à établir le diagnostic étiologique d’une détresse respiratoire aiguë: soit par hypoventilation avec une AaDO2 normale, soit par altération des échanges gazeux avec une AaDO2 élevée.

    Prenons un exemple d’une patiente de 21 ans, hospitalisée dans un état comateux avec suspicion d’un surdosage des médicaments psychotropes. La patiente est cyanosée, la fréquence respiratoire abaissée à 8/min, l’encombrement bronchiques avec la présence de résidus alimentaires, ce qui faire suspecter d’une pneumonie par inhalation. Le résultat des gaz du sang sous air ambiant montre un pH acide à 7,29; une PaO2 à 71 mmHg et une PaCO2 à 58 mmHg.

    Selon l’équation simplifiée des gaz alvéolaires: PAO2 = PIO2 – PaCO2/R = (760 – 47) * 0.21 – (58/0.8) = 77 mmHg. La PaO2 mesurée est de 71 mmHg ; l’AaDO2 est donc de 6 mmHg (77 – 71) ; la valeur normale de référence de l’AaDO2 (air ambiant) est de 9 mmHg (21/4 + 4).

    Ce résultat montre que l’hypoxémie est plutôt d’origine d’une simple hypoventilation, sans lésion pulmonaire associée comme, par exemple, une pneumopathie d’inhalation.

    Cependant en réalité, chez les patients hypoxémique ayant une augmentation de la PaCO2, on note une relation significative entre la PaCO2 et l’AaDO2, et chez des patients ayant une AaDO2 normale, on peut noter également l’existence des shunts non négligeables [13].

    D’ailleurs, chez des patients porteurs d’une BPCO, l’utilisation de cette équation pour estimer la PAO2 peut entraîner une sous-estimation de l’AaDO2, ce qui à son tour peut conduire à un faux diagnostic de l’état d’hypoxémie des patients [14].

    De la même façon, chez des patients en détresse respiratoire, une AaDO2 normale ne signifie pas que l’on peut éliminer totalement un trouble d’échanges gazeux. Chez les 773 patients avec une suspicion d’embolie pulmonaire, il a été noté que 13% des patients porteurs d’une embolie pulmonaire avérée ayant une AaDO2 normale (< 20 mmHg), et que ce pourcentage n’était pas différent à celui des patients sans embolie pulmonaire (16%). Ce résultat était similaire après correction aux antécédents cardiopulmonaires [15].

    En résumé, dans un certain nombre de situations, l’AaDO2 ne peut être utile pour distinguer les étiologies ou les mécanismes d’une détresse respiratoire aiguë, surtout lorsque différents processus physiopathologiques ont été mis en jeu chez un même patient.


    Evaluer la sévérité des lésions pulmonaires
    Dans une certaine mesure, il existe une bonne relation entre l’AaDO2 et la sévérité des lésions pulmonaires (évaluée par le ratio Qs/Qt). Cette relation peut donc être utilisée dans le suivi des lésions pulmonaires chez des patients ayant un SDRA. En revanche, lorsque ces derniers doivent être soumis à une ventilation mécanique, le rapport PaO2/FIO2 est préféré dans l’évaluation du pronostic des lésions pulmonaires car il est significativement associé à la mortalité élevée et à l’augmentation de la durée de ventilation mécanique [16].

    Néanmoins comme illustré au-dessus, il faut tenir compte du changement de l’AaDO2 en rapport avec la FIO2 et la pression télé-expiratoire positive (PEEP: Positive End-Expiratory Pressure) pour évaluer des patients en détresse respiratoire.

    Evaluer le pronostic de la détresse respiratoire
    En général, comme d’autres paramètres intervenant sur des échanges gazeux, l’AaDO2 ne donne pas de pronostic direct des patients en détresse respiratoire aiguë, puisque la cause de décès est, dans la majorité des cas, une défaillance multi-viscérale primitive ou secondaire plutôt que la détresse respiratoire elle-seule [2].

    L’équation des gaz alvéolaires permet de calculer la pression partielle en oxygène dans les alvéoles (PAO2), qui correspond à différents niveaux de pression atmosphérique (Patm) et de fraction inspirée en oxygène (PIO2). Cette équation exige les deux conditions correctes: 1) le sujet atteint un état d’équilibre (c’est-à-dire que le volume d’oxygène entrant dans les alvéoles est égale à celui qui en sort) ; 2) les valeurs de la PIO2 et de la PACO2 sont dans une fourchette viable. Il s’agit de la première étape dans l’évaluation de l’efficacité des échanges gazeux par des paramètres étudiés (AaDO2, PaO2/PAO2).

    La différence alvéolo-artérielle en oxygène (AaDO2) peut être correctement utilisée chez des patients sous oxygène à faible concentration, puisqu’il tient compte de l’influence de la PaCO2 sur la PAO2 et il est relativement peu influencé par la FIO2.

    Chez des patients sous ventilation mécanique avec une FIO2 élevée à 1 (oxygène pur), on peut estimer le shunt par AaDO2/5. En dehors de ces situations, on peut suivre l’évolution des lésions pulmonaires en mesurant l’AaDO2 aux mêmes niveaux de FIO2 et de PEEP.

    CONFLIT D’INTERETS

    Aucun.

    REFERENCES

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    FIGURES

     

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    ARTICLE INFO

    DOI: 10.12699/jfvp.5.14.2014.5

    Conflict of Interest
    Non

    Date of manuscript receiving
    8/01/2014

    Date of publication after correction
    15/4/2014


    Article citation 

    Le Huu Thien B, Huynh Quang D. Alveolar gas equation and alveolo-arterial difference in oxygen. J Func Vent Pulm 2014;05(14):5-11.